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De
la violence à la "voie de fin
silence"
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Le nom d'Élie, ce grand prophète, sonne haut et clair : « Le SEIGNEUR est mon Dieu ». Élie est le prophète jaloux de l'honneur du SEIGNEUR. Prophète de feu, va-t-il reconnaître le SEIGNEUR dans la voix qu'il entend à l'Horeb, non pas tonitruante, mais fine comme le silence ?
Le prophète du SEIGNEUR face aux Baals Élie est seul à défendre jalousement le culte du SEIGNEUR. Tous autour de lui, dans le Royaume du Nord (Samarie), s'accommodent trop bien des divinités cananéennes, les Baals. Au lecteur de la Bible de s'interroger : que reste-t-il du pacte de Sichem, du choix fondamental du peuple, « nous servirons le SEIGNEUR, car c'est lui notre Dieu » (Jos 24,18) ? Élie affronte seul, grandiose, imperturbable, le peuple et son roi Achab qui a laissé Jézabel, son épouse, favoriser le culte des Baals. « Jusqu'à quand clocherez-vous des deux jarrets ? » ainsi font-ils sans doute dans leurs danses rituelles ? Choisissez donc clairement. « Si c'est le SEIGNEUR qui est Dieu, suivez-le ; si c'est Baal, suivez-le. » (1 R 18,21) Hébété devant Élie, le peuple ne comprend pas son injonction, tellement il est normal de s'assurer la bénédiction du Vrai Dieu et le bienfait des autres dieux. N'est-elle pas aussi de notre temps cette prétention de retenir un peu de Vrai Dieu et beaucoup de faux dieux ? Élie seul défie les quatre cent cinquante prophètes de Baal, sûr de la vérité de son Dieu. Il engage un "match" saisissant : « Vous invoquerez le nom de votre dieu - O Baal, réponds-nous ! - et moi j'invoquerai le nom du SEIGNEUR - YHWH, Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, réponds-moi ! » à ne pas manquer (1 R 18,22-38). D'un côté, l'impuissance à faire descendre le feu du ciel sur leur autel, tandis qu'à la prière d'Élie le feu du ciel tombe et dévore l'holocauste (cf. Lv 1). Le Vrai Dieu seul répond. Nous aussi, nous applaudissons. Le texte reste ouvert à d'autres anonymes, « les gens tombèrent la face contre terre » et reconnaissent : « C'est le SEIGNEUR qui est Dieu. » (1 R 18,19)
Violence de la jalousie du prophète Pourquoi la révélation de Dieu s'achève-t-elle dans un bain de sang ? Pourquoi faut-il qu'Élie égorge tous les prophètes du Baal près du torrent du Qishôn ? Dieu ne l'a pas requis. La foi au Dieu vivant conduit-elle inexorablement au fanatisme ? Faut-il lire et appliquer à la lettre, comme Élie, « celui qui offre des sacrifices à d'autres dieux doit être voué à l'anathème » (Ex 22,19 ; Dt 13,6) ? Pour nous aujourd'hui, d'un coup cette vérité sur Dieu se voile et se teinte de couleurs sanglantes. Que de violence dans la Bible, et que dire tout au long de l'histoire chrétienne ? Dieu peut-il être reconnu dans ce zèle d'une puissance sans limite ? La révélation de Dieu se fait jour lentement à travers les ténèbres. La connaissance de Dieu ne cesse de mûrir dans une humanité pétrie hier comme aujourd'hui de violence. Elle ne renverse pas d'un coup la triste loi humaine mais se dit en assumant toute l'épaisseur et l'obscurité de cette histoire. Quels déplacements suggèrent la Bible ?
Élie à l'Horeb A cette démonstration fulgurante du SEIGNEUR va succéder une tout autre révélation (1 R 19). Élie, le violent, fuit avec ses peurs (v.3). Sa propre violence engendrerait-elle ce dégoût à vivre ? (v.4) Son zèle jaloux pour le SEIGNEUR semble s'être confondu avec sa propre violence. Ainsi Élie va-t-il vérifier les chemins du SEIGNEUR, en remontant aux sources, à la montagne d'où est parti le chemin du Vrai Dieu ? C'est le SEIGNEUR lui-même qu'il veut, comme Moïse, rencontrer (Ex 19,16ss). Le SEIGNEUR se révèle à lui, mais tout autre que ce qu'Élie en connaissait jusque-là « Le SEIGNEUR n'était pas dans l'ouragan le tremblement de terre le feu, mais dans une voix de fin silence Alors une voix lui parvint » (v.11-13). Si, au Carmel, Dieu se manifeste dans un signe éclatant, à l'Horeb, c'est dans la faiblesse, la douceur qu'il se fait entendre. La violence d'Élie se confondant avec le zèle pour Dieu se trouve ici confondue par l'absence de Dieu dans les éléments violents de la nature. Avec Élie, c'est à un recyclage théologique que nous sommes conviés pour changer notre regard sur Dieu et entendre avec lui cette voix non agressive, de fin silence. Et, il nous sera donné de l'entendre autour de Jésus-Christ.
Pour poursuivre la réflexion Repérer en quoi 1 R 19 et Dt 4 relisent et corrigent Ex 19. A quelles conversions de nos représentations divines sommes-nous appelés ? Relire Ac 2 (Pentecôte, fête du renouvellement de l'Alliance). Quelle nouvelle manifestation de Dieu pour tous ?
Texte biblique Le recyclage d'Élie (du Carmel à l'Horeb) (1 R 18-19) 18 Achab convoqua tout Israël et rassembla les prophètes sur le mont Carmel. (20) Élie s'approcha de tout le peuple et dit : "Jusqu'à quand clocherez-vous des deux jarrets ? Si le SEIGNEUR est Dieu, suivez-le ; si c'est Baal, suivez-le." Et le peuple ne put rien lui répondre. (21) Élie poursuivit : "Moi, je reste seul comme prophète du SEIGNEUR, et les prophètes de Baal sont quatre cent cinquante. (22) Donnez-nous deux jeunes taureaux ; qu'ils en choisissent un pour eux, qu'ils le dépècent et le placent sur le bois, mais qu'ils n'y mettent pas le feu. Moi, je préparerai l'autre taureau et je n'y mettrai pas le feu. (23) "Vous invoquerez le nom de votre dieu et moi, j'invoquerai le nom du SEIGNEUR : le dieu qui répondra par le feu, c'est lui qui est Dieu. Tout le peuple répondit : "C'est bien." (24) Élie dit alors aux prophètes de Baal : "Choisissez-vous un taureau et commencez, car vous êtes les plus nombreux. Invoquez le nom de votre dieu, mais ne mettez pas le feu." (25) Ils prirent le taureau et le préparèrent, et ils invoquèrent le nom de Baal, depuis le matin jusqu'à midi, en disant : "O Baal, réponds-nous ! " Mais il n'y eut ni voix ni réponse ; et ils dansaient en pliant le genou devant l'autel qu'ils avaient fait. (26) A midi, Élie se moqua d'eux et dit : "Criez plus fort, car c'est un dieu : il a des soucis ou des affaires, ou bien il est en voyage ; peut-être il dort et il se réveillera ! " (27) Ils crièrent plus fort et ils se tailladèrent, selon leur coutume, avec des épées et des lances jusqu'à l'effusion du sang. (28) Quand midi fut passé, ils se mirent à vaticiner jusqu'à l'heure de la présentation de l'offrande, mais il n'y eut aucune voix, ni réponse, ni signe d'attention. (29) Alors Élie dit à tout le peuple : "Approchez-vous de moi ! ". Et tout le peuple s'approcha de lui. Il répara l'autel du SEIGNEUR qui avait été démoli. (30) Élie prit douze pierres, selon le nombre des tribus des fils de Jacob, à qui Dieu s'était adressé en disant : "Ton nom sera Israël" (31), et il construisit un autel au nom du SEIGNEUR. Il fit un canal d'une contenance de deux boisseaux de semence autour de l'autel. (32) Il disposa le bois, dépeça le taureau et le plaça sur le bois. (33) Puis il dit : "Emplissez quatre jarres d'eau et versez-les sur l'holocauste et sur le bois", et ils firent ainsi ; il dit : "Doublez", et ils doublèrent ; il dit : "Triplez", et ils triplèrent. (34) L'eau se répandit autour de l'autel et même le canal fut rempli d'eau. (35) A l'heure où l'on présente l'offrande, Élie le prophète s'approche, dit : "SEIGNEUR, Dieu d'Abraham, d'Isaac et d'Israël, qu'on sache aujourd'hui que tu es Dieu en Israël, que je suis ton serviteur et que c'est par ton ordre que j'ai accompli toutes ces choses. (36) Réponds-moi, SEIGNEUR, réponds-moi, pour que ce peuple sache que c'est toi, SEIGNEUR, qui es Dieu et qui convertis leur cur ! " (37) Et le feu du SEIGNEUR tomba et dévora l'holocauste et le bois, et il absorba l'eau qui était dans le canal. (38) Tout le peuple le vit ; les gens tombèrent la face contre terre et dirent : "C'est le SEIGNEUR qui est Dieu ! C'est le SEIGNEUR qui est Dieu ! " (39) Élie leur dit : "Saisissez les prophètes de Baal, que pas un d'eux n'échappe", et ils les saisirent. Élie les fit descendre près du torrent du Qishôn, et là il les égorgea. (40) Élie dit à Achab : "Monte, mange et bois, car j'entends le grondement de la pluie." (41) ( ) Sur le coup, le ciel s'obscurcit de nuages et de tempête, il y eut une grosse pluie. Achab monta en char et partit pour Izréel. (45) La main du SEIGNEUR fut sur Élie, il ceignit ses reins et courut devant Achab jusqu'à l'arrivée à Izréel. (46) 19 Achab apprit à Jézabel tout ce qu'Élie avait fait et comment il avait massacré tous les prophètes par l'épée. (1) Jézabel envoya un messager à Élie avec ces paroles : "Que les dieux me fassent tel mal et y ajoutent tel autre, si demain à cette heure je ne fais pas de ta vie comme de la vie de l'un d'entre eux ! " (2) Il eut peur ; il se leva et partit pour sauver sa vie. Il arriva à Béer-Shéva qui est à Juda, et il laissa là son serviteur. (3) Pour lui, il marcha dans le désert un jour de chemin et il alla s'asseoir sous un genêt. Il souhaita de mourir et dit : "C'en est assez maintenant, SEIGNEUR ! Prends ma vie, car je ne suis pas meilleur que mes pères. "(4) Il se coucha et s'endormit. Voici qu'un ange le toucha : "Lève-toi et mange." (5) Il regarda, voici qu'il y avait à son chevet une galette cuite sur les pierres chauffées et une gourde d'eau. Il mangea et but, puis il se recoucha. (6) Mais l'ange du SEIGNEUR revint une seconde fois, le toucha et dit : "Lève-toi et mange, autrement le chemin sera trop long pour toi." (7) Il se leva, mangea et but puis, soutenu par cette nourriture, il marcha quarante jours et quarante nuits jusqu'à la montagne de Dieu, l'Horeb. (8) Là, il entra dans la grotte et il y resta pour la nuit. Voici que la parole du SEIGNEUR lui fut adressée, lui disant : "Que fais-tu ici, Élie ? " (9) Il répondit : "Je suis rempli d'un zèle jaloux pour le SEIGNEUR Sabaot, les Israélites ont abandonné ton alliance, ils ont abattu tes autels et tué tes prophètes par l'épée. Je suis resté moi seul et ils cherchent à m'enlever la vie." (10) Il lui fut dit : "Sors et tiens-toi dans la montagne devant le SEIGNEUR. "Et voici que le SEIGNEUR passa. Il y eut un grand ouragan, si fort qu'il fendait les montagnes et brisait les rochers, en avant du SEIGNEUR, mais le SEIGNEUR n'était pas dans l'ouragan ; et après l'ouragan un tremblement de terre, mais le SEIGNEUR n'était pas dans le tremblement de terre ; (11) et après le tremblement de terre un feu, mais le SEIGNEUR n'était pas dans le feu ; et après le feu, une voix de fin silence. (12) ( ) |