|
|
|
Entre
Dieu et nous : un
inter-dit !
|
||
La création, une uvre inachevée Dès la première page de la Bible (Gn 1-2,4a), Dieu se révèle. Curieuse façon cependant de procéder du narrateur ! Au lieu de nous présenter l'acteur principal, il nous donne plutôt à contempler son uvre. Dieu discret se manifeste comme en s'effaçant, en se retirant. Il laisse être et ne s'impose pas. Si sa parole réalise ce qu'elle annonce, si le programme annoncé est partout exécuté, il y a une curieuse exception « faisons l'homme à notre image comme notre ressemblance Dieu créa l'homme à son image, à l'image de Dieu il le créa, mâle et femelle il les créa. » (1,26s) L'uvre de ressemblance n'est pas exécutée, elle reste à faire. L'homme est un être inachevé, responsable de son histoire. Dieu n'est pas un magicien qui nous téléguide. Il entre en dialogue et se manifeste pour la vie : « Dieu les bénit et leur dit » (1,28) Il pose en premier le "nous" (l'humanité dans sa diversité sexuelle) avant de dire son propre "je" : « je vous donne » (1,29 ; Ps 104,13-15). N'est-il pas ouverture à l'autre ? Nous sommes désormais invités à regarder autrement le monde à partir de « Dieu vit tout ce qu'il avait fait : cela était très bon. » (Gn 1,31)
Le SEIGNEUR Dieu nous exhorte à choisir la vie Le deuxième récit est celui du jardin d'Éden (Gn 2,4b-3). Ce jardin de délices n'est pas un lieu clos sur lui-même, un fleuve s'en écoule vers le monde, en quatre bras (2,10-14). Il est le signe de cette vie venant de Dieu et se déversant sur le monde. La vie en est le centre et, fondamentalement, tout est bon à manger : « Le SEIGNEUR Dieu fit pousser du sol toute espèce d'arbres séduisants à voir et bons à manger, et l'arbre de vie au milieu du jardin, et l'arbre de la connaissance du bien et du mal. » (2,9) Sur cet horizon positif se fait entendre une parole de Dieu mettant de l'ordre (ordonne) : « Tu peux manger de tous les arbres du jardin. Mais de l'arbre de la connaissance du bien et du mal tu ne mangeras pas, car le jour où tu en mangeras, de mort tu mourras. » (2,17) En résumé, nous pouvons manger de tout moins un. Finalement, nous ne sommes privés ni de la négation, ni de la différence ; tout ne se vaut pas, un choix est possible. La loi ici est positive et structurante. Dieu, comme un père prévenant pour ses enfants, nous appelle à la vie et nous prévient du danger, ce n'est pas un piège mais un appel à la liberté : « Choisis donc la vie. » (Dt 30,19) Que va faire l'humanité de cette parole qui lui est confiée « pour la servir et la garder » (2,15) ?
Le serpent : une caricature de la parole de Dieu En ce jardin, plusieurs discours se laissent entendre : après la parole de Dieu (Gn 2,16s) voici sa caricature, la parole du serpent (3,1-5). Preuve que Dieu ne s'impose pas d'une manière totalitaire, sa parole est ainsi livrée au bon vouloir de l'humanité. Nous sommes prévenus de la ruse du serpent, symbole de l'origine obscure du mal. Il va manipuler la parole en introduisant la confusion. La première tentative suggère "tout est interdit". « Alors Dieu a dit : Vous ne mangerez pas (de) tous arbres du jardin ? » (3,1) En inversant les mots, le serpent propose la pire caricature de dieu : Vous ne mangerez pas (de) tout pas tout aucun tout est interdit. Odieuse caricature d'un dieu qui nous empêcherait de vivre en interdisant la nourriture. La seconde tentative suggère "tout est permis". Elle s'appuie sur la confusion des arbres. La femme répond : « Du fruit de l'arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit vous ne mangerez pas » (2,3) Elle se trompe, au centre est l'arbre de vie, il faisait donc partie du commandement positif. Le serpent surenchérit : « Pas du tout ! vous ne mourrez pas ! » (2,4). Effectivement, si c'est l'arbre de vie il n'y aurait plus le danger de mort le commandement est ainsi annulé. Le serpent suggère, ici, un dieu menteur. En promettant de devenir des dieux, il propose un monde polythéiste. Il annule la distance de la parole entre Dieu et l'humanité, le Créateur et sa créature.
Dieu n'est pas comme on se l'imagine En mangeant du fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, l'homme et la femme se sont trompés sur Dieu. Ils ont mangé le commandement, annihilé sa parole. Et si la faute consistait à se tromper sur Dieu ? La malédiction ne repose pas sur l'humanité mais sur le serpent et la terre (3,14-17), et la victoire sur le serpent est annoncée comme un premier évangile (3,15). Dieu se révèle dans une prévenance étonnante, il fera lui-même des vêtements pour l'homme, prémices de sa grâce (3,21). Et si la question de la mort a bien été posée, la vie triomphe par « Eve la mère des vivants » (3,20). Il nous faut nous libérer de l'image d'un dieu "guillotin". La parole « de mort tu mourras » (2,17) n'est pas un couperet. Notre père Adam vivra (sic) jusqu'à 930 ans (Gn 5,5).
Pour poursuivre la réflexion Lire Dt 30,15-20. Quels liens pouvez-vous établir avec Gn 2,4b- 3 ? Quelle conception de Dieu se révèle dans ces passages ?
Texte biblique La Parole de Dieu ou sa caricature ? (Gn 2,4b - 3) 2 Lorsque le SEIGNEUR Dieu fit terre et cieux (4b), aucun arbuste des champs n'était encore sur la terre, et aucune herbe des champs ne germait encore : car le SEIGNEUR Dieu n'avait pas fait pleuvoir sur la terre, et il n'y avait point d'Adam pour travailler l'adâmâh. (5) Le SEIGNEUR Dieu façonne l'Adam, poussière de l'adâmâh (6), il insuffle dans ses narines un souffle de vie et c'est l'Adam : être vivant. (7) Le SEIGNEUR Dieu plante un jardin en Éden, à l'orient, et il y met l'Adam qu'il avait façonné. (8) Le SEIGNEUR Dieu fait germer de l'adâmâh tout arbre agréable à voir et bon à manger et l'arbre de vie au milieu du jardin, et l'arbre de la connaissance du bien et du mal. (9) Un fleuve sort de l'Éden pour arroser le jardin, et de là il se divise en quatre têtes. (10) ( ) Le SEIGNEUR Dieu prend l'Adam, et le conduit dans le jardin d'Éden pour la servir et la garder. (15) Le SEIGNEUR Dieu ordonne à l'Adam : "De tous les arbres du jardin pour en manger, tu en mangeras, (16) de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, tu n'en mangeras pas, car du jour où tu en mangerais, de mort tu mourrais." (17) Le SEIGNEUR Dieu dit : "Ce n'est pas bien pour l'Adam d'être seul ; je ferai pour lui un secours en sa présence." (18) Le SEIGNEUR Dieu façonna de l'adâmâh tous les animaux des champs et tous les oiseaux des cieux, et il les fit venir vers l'Adam pour voir comment il les appelle et pour que chaque fois que l'Adam appelle un être vivant, ce soit là son nom. (19) L'Adam appelle d'un nom toute bête, tout oiseau des cieux et tout animal des champs. Et pour l'Adam, il ne trouve pas un secours en vis-à-vis de lui. (20) Le SEIGNEUR Dieu fit tomber un profond sommeil sur l'Adam, et il s'endort ; il prend une de ses côtes, et sous elle, il referme la chair. (21) Le SEIGNEUR Dieu bâtit la côte qu'il avait prise de l'Adam en ishâh. Il l'amène vers l'Adam. (22) Et l'Adam dit : "Voici cette fois celle-ci os de mes os et chair de ma chair ! " On l'appellera ishâh (épouse), car du ish (époux) celle-ci a été prise (23), c'est pourquoi l'ish laisse son père et sa mère, et s'attache à sa ishâh, et ils sont vers une seule chair. (24) Tous deux sont nus, l'Adam et sa ishâh, ils n'ont pas honte. (25) 3 Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs que le SEIGNEUR Dieu a faits. Il dit à l'ishâh : Alors Dieu a dit : "Vous ne mangerez pas tout arbre du jardin ? " (1) L'ishâh répondit au serpent : "Du fruit des arbres du jardin nous mangerons (2), mais du fruit de l'arbre au milieu du jardin, Dieu a dit : "Vous n'en mangerez pas, vous n'y toucherez pas, que vous ne mouriez." (3) Alors le serpent dit à l'ishâh : "Mourir, vous ne mourrez pas. (4) Car Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s'ouvriront, vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal." (5) L'ishâh vit que l'arbre est bon à manger et agréable à la vue, et qu'il était précieux pour ouvrir l'intelligence. Elle s'empare de son fruit ; elle mange, elle en donne aussi à son ish avec elle. Il en mange. (6) Leurs yeux de l'un et de l'autre s'ouvrirent, ils connurent qu'ils étaient nus, et ayant cousu des feuilles de figuier, ils s'en firent des ceintures. (7) Ils entendent la voix du SEIGNEUR Dieu, qui parcourait le jardin vers le soir, et l'Adam et sa ishâh se cachent de devant la face du SEIGNEUR Dieu, au milieu des arbres du jardin. (8) Le SEIGNEUR Dieu appelle vers l'Adam, et lui dit : "Où es-tu ? " (9) Il répondit : "J'ai entendu ta voix dans le jardin, et j'ai eu peur, parce que je suis nu, et je me suis caché." (10) Il dit : "Qui t'a appris que tu étais nu ? De l'arbre dont je t'avais ordonné de ne pas manger, as-tu mangé ? " (11) L'Adam répondit : " L'ishâh que tu m'as donnée pour être avec moi, c'est elle qui m'a donné de l'arbre. J'ai mangé." (12) Le SEIGNEUR Dieu dit à l'ishâh : "Pourquoi as-tu fait cela ? " L'ishâh répondit : "Le serpent m'a induite en erreur. J'ai mangé." (13) Le SEIGNEUR Dieu dit au serpent : "Puisque tu as fait cela, tu seras maudit entre tout le bétail et entre tous les animaux des champs, tu marcheras sur ton ventre, et tu mangeras de la poussière tous les jours de ta vie. (14) Je mettrai inimitié entre toi et la ishâh, entre ton lignage et son lignage : lui, il t'écrasera la tête ; toi, tu le mordras au talon. (15) Il dit à l'ishâh : "Multiplier, je multiplierai travail et grossesse, dans travail pénible tu enfanteras des fils. Tes désirs se porteront vers ton ish : lui, il dominera sur toi." (16) Il dit à l'Adam : "Puisque tu as écouté la voix de ta ishâh, et que tu as mangé de l'arbre au sujet duquel je t'avais ordonné en disant : "Tu n'en mangeras pas, maudite l'adâmâh à cause de toi. C'est dans la peine que tu t'en nourriras tous les jours de ta vie. (17) Elle te produira épines et ronces, et tu mangeras de l'herbe des champs. (18) C'est à la sueur de ton visage que tu mangeras du pain, jusqu'à ce que tu retournes vers l'adâmâh, d'où tu as été prise ; car tu es poussière, et tu retourneras en poussière." (19) L'Adam prononce le nom de sa ishâh : Eve, car elle est la mère de tous les vivants. (20) Le SEIGNEUR Dieu fait pour Adam et sa ishâh des habits de peau, et il les en vêt. (21) Le SEIGNEUR Dieu dit : "Oui, l'Adam est devenu comme l'un de nous pour la connaissance du bien et du mal. Maintenant, qu'il n'étende sa main, ne s'empare aussi de l'arbre de vie, ne mange et ne vive à jamais. (22) Le SEIGNEUR Dieu l'envoie du jardin d'Éden pour travailler l'adâmâh d'où il fut prise. (23) Il chasse l'Adam. Il installe, à l'orient du jardin d'Éden, les kéroubim et la flamme de l'épée tournoyante, pour garder le chemin de l'arbre de vie. (24) |